Un arc-en-ciel bleu et blanc

Cet article Un arc-en-ciel bleu et blanc a été publié au mois de septembre 2009 dans Contact J, le mensuel d’expression du judaïsme belge. Un an après, les meurtriers n’ont toujours pas été arrêtés et hier soir, il y a eu une marche de recueillement de Sderot Rotshild au Gan Meir.

Le samedi 8 août 2009, 70 000 personnes se réunissaient sur la place Rabin à Tel Aviv pour un rallye de solidarité avec les victimes d’un attentat contre la communauté homosexuelle. Le samedi précédent, le 1er août, un homme descendait la volée d’escaliers menant au BarNoar, le Bar des adolescents, rue Nahmani, un centre d’aide où les jeunes qui s’interrogent sur leur identité sexuelle peuvent trouver écoute et réconfort, et tirait. Deux jeunes sont tués, Nir Katz (26 ans) et Liz Trobishi (16 ans), 15 blessés.

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A Tel Aviv, la communauté homosexuelle est centrale, visible. La Gay Pride est depuis 1998, l’année où Dana International, transsexuel israélien, gagnait l’Eurovision, un rendez-vous annuel incontournable. Cette année, la parade gay figurait dans la liste des événements festifs du centenaire de la ville. La municipalité encourage le tourisme gay : un site, une brochure en anglais distribuée dans les agences de voyage. Le centre AGUDA Association of Gays, Lesbians, Bisexuals, and Transgenders in Israel montre ses couleurs arc-en-ciel en plein Gan Meir. L’acte meurtrier contre les homosexuels a été ressenti non seulement comme une attaque contre la communauté gay mais surtout contre l’art de vivre de Tel Aviv, son libéralisme, son pluralisme, son ouverture.

Les spéculations quant à l’identité et aux motivations du tueur vont bon train et certains, voulant faire de l’acceptation de l’homosexualité dans la société israélienne un enjeu entre laïcs et religieux, ont levé un doigt accusateur contre les religieux en général et le parti Shas en particulier.

Cependant, la situation est plus complexe qu’il n’y paraît et on observe un mouvement vers une plus grande tolérance dans les milieux religieux. Ainsi, il existe depuis l’année dernière une organisation d’homosexuels religieux, HOD qui s’essaie à la difficile conciliation entre vie religieuse orthodoxe et homosexualité. Dans un sondage réalisé immédiatement après l’attaque,  à la question: « Est-ce que l’homosexualité constitue selon vous une déviance? », 29% des haredim et 33% des religieux ont répondu par la négative. Un résultat surprenant si on tient compte de l’interdit biblique, Lévitique 18:22 « Tu ne coucheras pas avec un homme comme on couche avec une femme. C’est une abomination. » (L’homosexualité féminine n’est nulle part explicitement mentionnée.)

Les homosexuels ont commencé à revendiquer leurs droits dans les années 1970. L’activité sexuelle entre personnes du même sexe est légale depuis 1988. Israël a été le premier pays en Asie où les gays sont protégés par des lois anti discriminatoires : ils peuvent faire leur service militaire sans discrimination aucune et depuis 1992, une législation interdit la discrimination à l’emploi sur des bases d’orientation sexuelle. Depuis 2006, suite à une décision de la Cour suprême, les couples lesbiens sont autorisés à adopter les enfants biologiques de leur partenaire et depuis 2009, le droit à l’adoption des couples homosexuels a été reconnu.

Ce soir-là, dans une ambiance retenue et chaleureuse, sur une place Rabin bondée, les drapeaux arc-en-ciel se mélangeaient aux drapeaux d’Israël. Les interventions de politiques de tous bords se mêlaient aux témoignages de personnalités de la communauté homosexuelle. Le président Shimon Peres sur la même scène que Dana International déclarait: Chaque citoyen a le droit d’être celui qu’il veut être. Et, le rallye de solidarité à la communauté homosexuelle s’est terminé par l’Hatiqva.

©Rachel Samoul

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