Césarée, d’Hérode à Eyal Golan

Cet article a été publié dans le Fax de Jérusalem, le mensuel de l’organisation sioniste de Belgique.

Photo @Kef Israel

Bonjour, je m’appelle Hérode et c’est moi qui ai construit cette ville. Le palais, le port, parfaitement abrité, aussi grand que le Pirée. Vous avez des questions? Pourquoi le nom de Césarée? Je lui ai donné le nom de mon bienfaiteur César Auguste grace à qui j’ai pu devenir roi de Judée.

Voilà des années que je n’avais pas été dans le parc national de Césarée, situé à mi-distance entre Tel Aviv et Haïfa, et j’ai été surprise par les nombreux changements sur le site. Ainsi le dialogue ci-dessus est la retranscription d’une conversation que vous pouvez avoir avec douze personnages qui ont fait Césarée, douze hologrammes grandeur nature. Posez-leur des questions en plusieurs langues dont le français. C’est assez drôle de converser avec Rabbi Akiva dans cette langue mais tout à fait naturel quand il s’agit de Saint Louis ou du Baron de Rotschild. Grâce à cette bien sympathique installation interactive, vous vous familiarisez avec la Césarée romaine, byzantine ou croisée, chrétienne, juive ou ottomane.

Ainsi vous apprendrez que dans le théâtre romain, on a retrouvé la seule source archéologique, une inscription sur une pierre, qui corrobore l’existence de Pilate, procurateur de Judée.


Césarée joue un rôle important dans l’histoire chrétienne. C’est aussi dans cette ville que le centurion Corneille fut le premier païen à être baptisé, jusque-là la communauté chrétienne recrutait seulement chez les Juifs. A Césarée, l’apôtre Paul, alias Saul de Tarse fut retenu prisonnier pendant trois ans avant d’être envoyé à Rome.

C’est peut-être dans l’hippodrome du roi Hérode, qui pouvait accueillir plus de 10 000 spectateurs, que les prisonniers juifs de la révolte de Bar Kokhba (132-135) furent massacrés par les gladiateurs, et leur chef, rabbi Akiva, écorché vif.

Du IIe au Ve siècle, des rabbins de grande renommée y séjournèrent comme le rav Abbahu. Le traité masseketh Nezikin (dommages) du Talmud fut compilé à Césarée.

Mais Césarée n’a pas été qu’une ville romaine ou byzantine. Elle fut conquise en 1101 par l’armée franque conduite par le roi Baudouin Ier et devint croisée. Les fortifications construites par Louis IX, roi de France alias Saint-Louis ne suffirent pas à repousser le sultan mamelouk Baybars qui mit fin à la domination croisée en 1265. Pourtant, les fortifications sont toujours là. La ville et le port disparurent peu à peu, enfouis sous les dunes de sable.

Grand saut dans le temps et nous retrouvons le Baron Edmond de Rothschild qui acheta à la fin du XIXème siècle des dunes de sable et des terres marécageuses autour des ruines de Césarée. En 1940, près du théâtre romain, voit le jour le kibboutz Sdot Yam (Champs de la mer), le kibboutz de Hannah Sénesh (1921-1944) qui fut parachutée à l’intérieur des lignes allemandes pendant la Deuxième Guerre mondiale. Prise par les Nazis, elle fut torturée et exécutée.

J’ajouterais volontiers à cette galerie de portraits, celui d’André Bendavid, directeur du parc national depuis 2002. Je l’ai rencontré en chair et en os, pas en hologramme! Il parle avec enthousiasme de Césarée, devenu un parc national en 1963. Il raconte les premières fouilles effectuées entre 1950 et 1960 par la Mission archéologique italienne associée à l’Université hébraïque de Jérusalem. Il explique comment l’histoire même des fouilles est liée à l’histoire d’Israël puisque de nouvelles fouilles entreprises dans les années 90 étaient destinées à fournir du travail à la vague de nouveaux immigrants arrivés de Russie. A ce moment-là, l’hippodrome fut totalement dégagé et des fouilles sous-marines faites en collaboration avec l’université de Haïfa. Il donne des chiffres: un million de visiteurs par an à Césarée, Cinquante-quatre concerts l’été dernier dans le théâtre d’Hérode. Et une révolution: la conquête de Césarée, jusqu’à présent le fief de Shlomo Artzi ou de Rita, par les chanteurs mizrahim, Kobi Peretz etEyal Golan (Eyal Golan a été élu chanteur israélien de la décennie), les chanteurs orientaux d’Israël.

Courses de chars dans l’hippodrome, circuit archéologique sous-marin dans le port, concert d’Eyal Golan dans le théâtre d’Hérode. Le passé et le présent se télescopent. Nous sommes en Israël.


@Rachel Samoul