Israël l’été, les enfants à la clé
Que font les enfants israéliens pendant les vacances quand leurs parents travaillent?
J’ai posé la question à Carmela Shamir, la Directrice-adjointe du Département Amérique du Nord au Ministère des Affaires étrangères et mère de trois enfants Ella, 8 ans, Ido, 6 ans et demi et Yaël, 2 ans et demi.
Elle a soupiré. Le mot-clé est le mot arrangement, arrangement avec les amis, la famille, les parents, les baby-sitters. Au mois de juillet, elle peut plus au moins jongler entre les différents stages et activités auxquels elle inscrit ses enfants mais en août la situation devient impossible puisque presque toutes les structures d’accueil prennent aussi des vacances. Elle doit donc se mettre en vacances pour pouvoir s’occuper des enfants. Le coût économique est très lourd. Elle attend la rentrée avec impatience mais ce n’est qu’une promesse de rentrée puisqu’après deux semaines de cours, c’est encore les vacances avec Rosh Hashana, Yom Kippour, Souccoth…
C’est un fait : en Israël, l’écart entre les jours des vacances des parents et ceux des enfants est très élevé.
Jours de vacances Enfants Jours de vacances Parents écart entre les deux
Israël 93 19 74
France 81 31 50
Danemark 61 34 27
Il faut cependant prendre en compte que paradoxalement, pendant l’année scolaire, les jours d’étude en Israël sont plus nombreux. Les élèves se rendent à l’école six fois par semaine et non cinq fois comme en Europe. Les enfants israéliens étudient 210 jours dans le primaire tandis que pendant l’année scolaire, les Danois ont 200 jours d’école, les Français 180 jours.
Le déficit de vacances des enfants par rapport à celles des parents engendre un vrai problème social. Pas tout le monde a les moyens de payer des stages à ses enfants.
Irit Shifris, irit@rehovot.muni.il la directrice du département des services sociaux de la municipalité de Rehovot m’explique que la majorité des centres aérés sont organisés par les centres communautaires, les matnassim, מתנסים. Le prix moyen est de 950 shekels. La municipalité prend en charge les dépenses de certains enfants soit parce que les familles en ont fait la demande, soit parce que ce sont des familles connues des services sociaux. Le montant des subsides accordé pour l’aide aux colonies varie d’une ville à l’autre. Notre budget est insuffisant, déplore-t-elle, et nos possibilités d’action reposent aussi sur des dons de particuliers ou d’organismes privés.
Nous savons que l’été est une période à risque pour les adolescents mais aussi pour les enfants en bas âge. Les crèches sont fermées seulement trois semaines en août mais les jardins d’enfants ne fonctionnent plus à partir du 1er juillet et malheureusement de jeunes enfants de 5 ans sont souvent livrés à leur sort ou confiés à des frères ou des sœurs légèrement plus grands, les parents devant travailler. L’été dernier, une de nos assistantes sociales a retrouvé une petite fille de cinq ans en train d’errer seule dans les rues de son quartier. Pendant les vacances, le nombre d’enfants blessés dans des accidents de la route augmente et le taux de délinquance aussi. A Rehovot, nous avons mis sur pied un programme où des adolescentes en difficulté reçoivent une bourse symbolique pour aider au fonctionnement des crêches l’été. Il y manque du personnel car de nombreuses puéricultrices prennent des vacances pour pouvoir s’occuper de leurs propres enfants. C’est donc une aide importante pour les crèches et ainsi, les jeunes bénéficient d’une initiation au travail et d’un cadre pendant les vacances.
Nous essayons de faire preuve de créativité mais la tâche est difficile.
En Israël, il existe une expression qui est passée dans le langage courant et qui désignent les enfants qui doivent se débrouiller tout seuls quand les parents travaillent, ce sont les מפתחות ילדי, Yaldei maftehot, littéralement les enfants-clés, on dirait les enfants la clé au cou. Les parents leur confient la clé de la maison en espérant que ce ne soit pas la clé des champs …
Bonne fin de vacances
©Rachel Samoul